Article de l'Avantage Gaspésien
Aire protégée des monts Chic-Chocs : le projet, exposé à Matane, veut s’inviter dans la campagne électorale
Stéphane Quintin stephane.quintin@tc.tc
Publié le 3 juillet 2018
Des inventaires scientifiques élaborés dans le secteur ont permis de mettre en valeur la richesse de la biodiversité locale, menacée par l'activité industrielle.
©Photo gracieuseté comité de protection des monts Chic-Chocs
Au cours de l’été, le comité de protection des monts Chic-Chocs de la réserve faunique de Matane entend bien se mobiliser pour sensibiliser la population à leur projet d’instauration d’une aire protégée dans la montagne, destinée à préserver le riche écosystème des lieux des menaces de l’exploitation forestière, minière et pétrolière. Plusieurs expositions sont notamment prévues à Matane dans le cadre d'une vaste campagne de visibilité.
Publicité
Pour les membres du comité de protection des monts Chic-Chocs, l’été 2018, coïncidant avec la campagne pour les élections générales, doit représenter une nouvelle étape dans un combat vieux de 11 ans, dont l’objectif est la création d’une aire protégée de 400 km2 au niveau du territoire montagneux de la réserve faunique de Matane, destinée à favoriser la sauvegarde d’une biodiversité vulnérable et à préserver la beauté des paysages naturels qui en font une destination touristique appréciée par les amateurs de randonnée.
Une vraie volonté politique devrait pouvoir soustraire ce milieu naturel d’exception aux enjeux pétroliers qui freinent le dossier depuis plusieurs années.
Louis Fradette, porte-parole du comité de protection des monts Chic-Chocs
Publicité
Plusieurs photos seront exposées à Matane durant l'été pour sensibiliser la population au projet.
Photo L'Avantage gaspésien - Stéphane Quintin
« Nous avons mis sur pied cette campagne de visibilité dans le but de mieux faire connaître le projet et son territoire auprès de la population locale et la clientèle touristique, et pour rappeler qu’il s’agit là d’un enjeu électoral », ont expliqué les membres du comité en soulignant qu’ils souhaitaient voir, dans les mois à venir, les candidats au poste de député se prononcer publiquement sur cette question. Le comité de protection des monts Chic-Chocs a rappelé à cette occasion qu’alors que le Québec s’est engagé à protéger 17% de son territoire d’ici à 2020, moins de 5% du Bas-Saint-Laurent bénéficie présentement d’un tel statut. « Une vraie volonté politique devrait pouvoir soustraire ce milieu naturel d’exception aux enjeux pétroliers qui freinent le dossier depuis plusieurs années », a déclaré Louis Fradette, porte-parole du comité.
Plusieurs actions de visibilité à Matane
Englobant différentes actions durant l’été, la campagne de visibilité lancée par le comité de protection des monts Chic-Chocs comprendra notamment une exposition temporaire prévue les 6 et 7 juillet à la salle Isabelle Boulay du complexe culturel Joseph-Rouleau de Matane. Supervisé par le peintre Philippe Giroux, passionné de pêche au saumon et spécialisé dans les paysages de rivières, cette exposition collective regroupera des peintures, sculptures et illustrations de six artistes locaux. Elle sera accompagnée d’une exposition parallèle de photographies et vidéos d’Elbert Barthault intitulée « Forêts, y penser », déployée au centre d’artistes Espace F jusqu’au 25 août. Un vernissage est prévu vendredi à 17h, auquel toute la population est invitée.
La régénération végétale apparaît plus difficile au niveau des sommets en raison des conditions climatiques plus rudes.
Photo gracieuseté comité de protection des monts Chic-Chocs
Par ailleurs, afin de mettre en lumière la richesse de ce territoire, que des amoureux de la nature cherchent à protéger de manière active depuis maintenant 11 ans, avec l’appui d’une cinquantaine de scientifiques, organismes et entreprises, plusieurs photographies seront installées à divers endroits du centre-ville de Matane durant l’été comme au bar Le Lounge, à la microbrasserie La Fabrique, au Café du monde ou encore à l’entrée du parc des Îles, vers le terrain de volleyball. Des livres sur les montagnes, les forêts et la conservation de la nature seront aussi disponibles à la Chouette librairie, à la bibliothèque municipale et à la bibliothèque du Cégep. Enfin, des discussions sont en cours pour déterminer les modalités d’un partenariat de visibilité avec le festival École en musique.
Un projet de protection vieux d’une dizaine d’années
La zone visée par le projet de protection concerne surtout les zones montagneuses, où le développement du tourisme apparaît comme un critère supplémentaire de préservation de la nature à ce niveau-là.
Photo gracieuseté comité de protection des monts Chic-Chocs
Le territoire de 400 km2 visé par le projet d’aire protégée de catégorie 3 de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), une catégorie qui autoriserait toujours la pratique de la chasse et de la pêche mais permettrait de lutter contre les industries forestières, minières, pétrolières et l’implantation d’éoliennes, couvre essentiellement la partie montagneuse de la réserve faunique de Matane, créée en 1962 et d’une superficie totale de 1 275 km2. « Notre engagement a débuté il y a 11 ans, interloqués par les coupes forestières qui atteignaient les pentes fortes et les sommets de la réserve, où la régénération végétale est très pauvre en raison des conditions de croissance plus difficiles à cette altitude », a expliqué Louis Fradette en précisant qu’une quarantaine de sommets dans la zone dépassaient une les 800 mètres et en rappelant à quel point la faune et la flore exceptionnelles du secteur étaient menacées par la modification humaine de ces habitats.
Quatre couples nicheurs d'aigles royaux ont été répertoriés dans la vallée du ruisseau des Pitounes.
Photo gracieuseté comité de protection des monts Chic-Chocs
Parmi les espèces en péril, le comité de protection, aidé de dizaines de biologistes, a notamment réussi à effectuer plusieurs inventaires scientifiques au cours des dernières années, indiquant notamment la présence d’espèces menacées comme la grive de Bicknell ou encore l’aigle royal, dont quatre couples nicheurs ont été répertoriés dans les environs de la vallée du ruisseau des Pitounes. Quant aux caribous montagnards, ils sont visibles à l’est de ce territoire, à proximité du parc de la Gaspésie, mais la présence de lichens sur les monts Chic-Chocs en fait un habitat potentiel pour cette espèce emblématique de la région, que l’activité humaine a poussée dans ses retranchements. Les différentes raisons justifiant, selon le comité, la création de cette aire protégée dans les zones montagnardes de la réserve faunique de Matane sont expliquées de manière plus détaillée sur le site internet du projet, chic-chocs.org, où tout l’historique de la démarche peut être consulté à tout moment par les citoyens interpelés par la cause.